Le neuromarketing, apparu au début du 21ème siècle, est l’application des connaissances issues de la recherche publique en neurosciences cognitives au marketing et à la communication. Le but de cette discipline émergente est de mieux comprendre les comportements des consommateurs grâce à l’identification des mécanismes cérébraux qui interviennent lors d’un achat.
Le neuromarketing étudie via les neurosciences, du fonctionnement du cerveau humain lorsque soumis à des stimuli qui peuvent être des marques, des produits ou des publicités.
Le neuromarketing peut se diviser en trois axes :
1.Application des découvertes des chercheurs sur le fonctionnement cérébral pour rendre plus pertinents les outils de communication (publicités, sites Internet). Ceci vise à améliorer les caractéristiques soit de l’outil soit de sa diffusion (neuroplanning).
2.Utilisation de l’électro-encéphalographie (EEG), couplée à l’enregistrement de la conductance du derme ainsi qu’à l’oculométrie. Cela permet de mesurer les niveaux d’attention et d’émotion générées par un spot de publicité. L’avantage de cette méthode est la précision temporelle qui permet de suivre l’activation cérébrale tout au long de la publicité. Sa faible précision spatiale ainsi que son impossibilité d’enregistrer des régions profondes du cerveau la limite dans son utilisation.
3.Exploitation des résultats obtenus grâce à l’imagerie par résonance magnétique (IRMf). Cette technique permet d’observer l’ensemble des zones du cerveau susceptibles d’être activées avec en plus une très grande précision anatomique (de l’ordre du millimètre). Elle est donc la plus efficace pour rendre compte de l’image d’une marque ou d’un produit. Ses limites se situent au niveau de la précision temporelle et de l’impossibilité d’effectuer des mesures dans les lieux d’achat.
Reportage Neuro-marketing et politique
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IRM ELECTRO ENCEPHALOGRAMME OU CLIGNEMENTS DE L’ŒIL
Les différentes techniques d’imagerie médicale auxquels cette nouvelle discipline fait appel permettent d’enregistrer la réponse cérébrale d’un agent économique dans certaines situations, telles que le visionnage d’une publicité, le test de produits concurrents, l’acte d’achat en situation réelle, etc… L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) et l’électro-encéphalographie (EEG) sont notamment mises à contribution pour cerner les mécanismes neurologiques liés à la préférence, l’attention, la mémorisation et les émotions qui peuvent induire la décision d’achat. Des agences de neuromarketing proposent déjà ces services d’une grande innovation telles que “BrightHouse Neurostrategies” (USA), “Neurofocus” (USA, Angleterre), “FKF Applied research” (USA), “En tête” (France), “Imagilys” (France, Belgique) et un large échantillon de grandes marques en a déjà profité.
Néanmoins, ne pouvant être transportée sur les lieux de l’acte de consommation, l’IRM introduit un biais dans les tests réalisés, puisqu’elle ne tient pas compte du contexte d’achat dans son ensemble. Pour pallier cette insuffisance, certains chercheurs utilisent alors l’électro-encéphalogramme, qui mesure l’activité électrique du cerveau. Des expériences ont ainsi pu être directement effectuées en supermarché. Mais la technique reste peu fiable à l’heure actuelle.
“L’outil est très sensible aux mouvements environnants, aux néons, aux ondes électromagnétiques ou tout simplement aux mouvements de la tête, note le chercheur. En outre, il n’enregistre que l’activité cérébrale de surface alors que la prise de décision sollicite aussi des parties du cerveau plus profondes.”.
Unilever, quant à lui, a opté pour une troisième méthode, comme le rapporte un article du Time Magazine : ses chercheurs observaient les clignements de l’œil des sujets pour savoir si manger de la glace les rendait plus heureux que de manger du yaourt ou du chocolat.
DES ZONES PARTICULIÈRES DU CERVEAU SOLLICITÉES
Avec les neurosciences, on va chercher à savoir quels sens priment dans le choix du produit afin d’adapter non seulement la publicité mais souvent le produit lui-même au cours de sa conception. Toutefois, l’approche multisensorielle ne fait pas tout, l’activité des parties du cerveau impliquées dans la mémoire est tout aussi importante.”
Il existe dans le cerveau un circuit de la récompense qui indique un message “bien” ou “mal”, “gain” ou “perte” pour chaque action. C’est ce que mesure l’IRMf, ou imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, examen qui mesure la consommation d’oxygène dans les tissus du cerveau en fonction des actions du sujet.
Contrairement aux méthodes de sondage, l’IRM enregistre une réponse directe, non déviée, transformée ou atténuée par la parole. Ainsi, rappelle Olivier Oullier, “en 2004, une étude menée pendant les élections américaines a permis de montrer que la réaction des démocrates aux images du 11 septembre est plus élevée dans l’amygdale, une zone du cerveau associée à la peur, que celle des républicains, alors que lors d’un simple sondage cette différence n’apparaissait pas.”
L’UTILISATION DES NEURONES MIROIRS
Une étude (6) faisant varier à l’aide de techniques de morphing les traits distinctifs d’un visage masculin. L’étude prouve d’une part que les femmes sont plus sensibles à une version «virile» du visage, tandis que les hommes le préfèrent «féminin» ou «juvénile». Elle montre d’autre part que «les visages les plus appréciés activent le circuit de récompense (noyau accumbens en particulier)». O. Droulers et B. Roullet en tirent la conclusion que l’«on peut alors imaginer qu’une publicité presse (…) mettant en scène un mannequin, soit adaptée et “morphée” selon le support concerné et le genre majoritaire de son lectorat».
Les mêmes évoquent également la découverte des neurones miroirs «qui s’activent lorsqu’on fait un geste particulier, lorsqu’on imagine le faire ou encore lorsqu’on le voit s’accomplir chez autrui (même de façon statique sur une photo)», et qui seraient le support de l’empathie et de l’apprentissage par imitation. Ils en tirent la leçon que «toute “présentation produit” doit se faire en situation avec un utilisateur actif, pour que les neurones miroirs du regardant soient activés “comme si” le geste était réalisé. Cette “empathie” motrice serait plus persuasive que la vision simple du produit». Pour le téléguidage du consommateur, par contre, il faudra repasser.
BASE SUR DES ETUDES SCIENTIFIQUES
Le Neuromarketing est née des recherches du docteur Read Montague, chercheur à l’université de Baylor (Texas). D’autres chercheurs, tant en économie qu’en gestion et marketing, avaient déjà tenté d’intégrer des données neuroscientifiques à leurs paradigmes théoriques [2].
L’expérimentation neurologique est souvent complexe, coûteuse et de facto réservée en priorité aux études pathologiques : les techniques les plus légères (électro-encéphalographie) sont dès lors les plus couramment utilisées[3].
Les biais introduits par les méthodologies expérimentales imposées par les appareils de mesure actuels limitent la pertinence des résultats obtenus, qui se limitent pour le moment à la mise en évidence de mécanismes décisionnels généraux et à la mesure de préférences spontanées.
En 1998, Dehaene et al. mettent en évidence[4] un effet facilitateur (temps de décision raccourci si deux stimuli successifs induisent la même décision au terme du second stimuli), aussi bien par IRMf qu’électro-encéphalographie. Dans un contexte de prise de décision économique, des stimulis bien choisis pourraient dès lors, peut-être, avoir une influence non négligeable. Ces perspectives sont à la base de l’intérêt des milieux marketing pour les études neuronales aux débuts des années 2000.
En 2004, McLure et al. conduisent une étude[5] aux résultats largement relayés dans les médias sur les préférences implicites et explicites de consommation entre deux marques de sodas (Pepsi et Coca-Cola). Par deux tests, le premier consistant en une dégustation de deux échantillons différents sans connaissance des deux marques, le second consistant en une dégustation de deux échantillons avec connaissance d’une des deux marques seulement (ce second test étant répété deux fois, pour les deux marques), les chercheurs mettent en évidence l’influence de la marque sur l’appréciation explicite du produit par les consommateurs. Sans connaissance des marques, ou en connaissance de la marque Pepsi, ils ne montraient statistiquement pas de préférence notable pour l’un ou l’autre des deux échantillons. Lorsqu’ils savaient être en train de boire du Coca-Cola, une nette préférence pour ce soda était rexprimée.
Dans le premier cas, c’est essentiellement le putamen qui était actif (valeurs gustatives, plaisir).
Dans le second cas, en plus du cortex préfrontal ventromédian, l’hippocampe, le cortex préfrontal dorsolatéral, le tronc central étaient actifs, tandis que le putamen était nettement en retrait. Les deux types de réponses constituant des comportements objectifs au sens des réflexes neurologiques, cette étude mettait en évidence l’influence de la mémorisation et de la marque Coca-Cola.
DEVELOPPEMENT FUTURS
À l’heure actuelle, peu d’entreprises communiquent sur leur usage du neuromarketing qui, somme toute, donne une image discutable auprès de l’opinion publique. Daimler Chrysler, qui avait commandé une étude et communiqué dessus il y a quelques temps, s’est depuis enfermé dans son mutisme. Sans parler du fait que les résultats du neuromarketing étant réels, mieux vaut ne pas ébruiter sa stratégie et ses méthodes. D’ailleurs, si les expériences connues se limitent jusqu’ici à quelques dizaines de participants, certaines entreprises ont déjà effectué des tests sur des centaines de personnes sans rien en divulguer.
Mais nul doute qu’au juger de son efficacité, le neuromarketing est appelé à se développer même si ces études coutent très chers. Certains aspects de cette nouvelle “science” en sont encore au stade expérimental. À ce jour plusieurs études mettent en évidence le rôle important de la mémorisation dans l’acte d’achat, mais le lien entre préférences spontanées et mémoire n’a pas encore été découvert.
Un des développements du neuromarketing est de donner des indications sur la manière d’améliorer la mémorisation et ainsi les préférences, ce qui suppose de quantifier efficacement la mémorisation d’actes publicitaires ou commerciaux. Toutefois, « se souvenir » n’est pas « acheter » et pour les publicitaires, l’enjeu reste d’associer à une préférence conditionnée, une intention d’achat “effective”.
Un autre développement du neuromarketing se base sur la comparaison entre les effets de deux marques, de deux produits ou de deux spots de publicité. On peut ainsi voir d’une part les ressentis propres à l’objet et d’autre part ce qui le distingue de la concurrence. Le neuromarketing permet d’obtenir des réponses enfin fiables car basées sur une multitude de travaux scientifiques. Pour la première fois la science rejoint le marketing.
Conclusion : l’objectif recherché par les défendeurs du neuromarketing est d’augmenter la consommation “citoyenne”, en ne considérant plus sa capacité de jugement mais sa réceptivité à un stimulus, lui retirant ainsi la rationalité de ses besoins.
L’expression “temps de cerveau humain disponible” employé par Patrick Lelay sur Tf1 en 2004 prend avec ces recherches une toute autre dimension; elle ouvre une nouvelle et inquiétante perspective au neuromarketing : déterminer le type de programme susceptible. Les applications concrètes du neuromarketing sont très diverses. Ainsi, aux États-Unis, les banques utilisent par exemple le neuromarketing pour améliorer la manière de présenter un prêt. Les détracteurs jugent avec raison, que d’orienter la recherche neuronale dans le but d’influencer les choix des consommateurs est un manque d’éthique scientifique.
Et quand on voit les avancées des neurosciences on se dit que dans les mains des marketeurs, ces techniques pourraient dangereusement dériver…
1. a et b O. Droulers et B. Roullet, Neuromarketing : cadre théorique et perspectives [archive] [pdf], in Actes du 22e congrès AFM, Nantes, 2006
2. Neuromarketing : Is it coming to a lab near you ? [archive], Frontline - PBS, 2004
3. La large diffusion des machines IRM aux États-Unis et leur utilisation partagée entre services médicaux et organismes de recherche constitue une exception importante, du fait qu’une grande partie des études de neuromarketing sont réalisées aux États-Unis.
4. S. Dehaene et al., Imaging unconscious semantic priming, Nature, n° 395, 1998
5. S. McLure et al., Neural correlates of behavioral preferences for culturally familliar drinks [archive] [pdf], Neuron, vol. 44, 2004
6 Les applications des sciences humaines à la publicité : de la psychanalyse à la sociocognition implicite et au neuromarketing », Humanisme et Entreprise, n° 276, avril 2006.
Sources :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Neuromarketing
http://www.journaldunet.com/management/dossiers/0702175-neuromarketing/guide.shtml
http://www.rue89.com/tele89/2010/05/26/neuromarketing-a-quel-point-sommes-nous-manipules-152508
http://www.scienceshumaines.com/le-neuromarketing-lit-il-dans-nos-pensees-_fr_22768.html
http://neo-sphere.blogspot.com/2008/02/neuromarketing-publicit-scanner.html
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